1-Lutter contre les idées reçues
J'entends souvent dire : " oh, oui, c'est vrai qu'il a un problème avec l'écriture cursive, mais en fait il est surtout fainéant!"
Et pourtant, je ne connais aucun enfant "dysgraphique par fainéantise", je vous assure, et je pense que ça n'existe tout simplement pas. Par définition, le fainéant en fait le moins possible. Croyez vous que le dysgraphique dont on exige de refaire le devoir, à qui on arrache la feuille jugée trop sale ou indigne d'un travail scolaire, qui passe ses récréations et ses soirées à finir ce que les autres ont fait en cinq minutes ait le moindre intérêt à ce que cette situation perdure?
Bien évidemment non. Si en plus on sait que l'écriture cursive leur est coûteuse ( en énergie, en concentration, et même en douleur physique ) vous conviendrez avec moi que ces enfants ont du mérite. Ils ont beau faire des efforts et progresser ce n'est jamais assez. Ils progressent, bien sur, mais pour leur malheur les autres élèves aussi, de même que les exigences des enseignants.
Comment réagiriez-vous si on vous demandait de faire tous les jours, et tous les soirs à la maison un travail que vous n'êtes pas capable de faire correctement, quelle qu'en soit la raison? Vous jetteriez sans nul doute l'éponge. Mais nos enfants n'ont pas cette possibilité, alors chacun choisit sa méthode : faire le clown, pleurer, faire semblant de s'en moquer éperdument, serrer les dents. Ce qui malheureusement ne résout pas le problème.
Gardons donc les points suivants à l'esprit :
- Non, il ne fait pas exprès d'écrire lentement.
- Non, il ne fait pas exprès d'écrire salement.
- Il n'en peut plus de cette écriture qui lui gâche ses journées d'école et qui le stresse, même s'il fait le fanfaron en classe et ne le montre surtout pas.
- Il se sent nul, incapable, débile (ce sont les mots même des enfants que je reçois en consultation )
2-Valoriser l'enfant
Une fois que l'on a compris cela, on est en devoir de valoriser l'enfant et de l'aider à progresser.
La méthode est simple : ne demander à l'enfant que ce qu'il est capable de faire.
Il n'écrit qu'une ligne alors que les autres en écrivent cinq? Ne le faites écrire que le strict minimum ( la date en toutes lettres est elle indispensable? Et la recopie de l'énoncé de l'exercice en entier ? ). Et petit à petit, vous augmentez la dose, très progressivement. Il sera enfin fier d'avoir réussi à atteindre les objectifs que vous lui aviez donnés, ce qui l'encouragera à progresser et à se surpasser.
Il écrit salement? Demandez lui d'écrire moins, mais mieux. Là encore, il sera enfin fier de son travail.
Et de votre côté, vous valorisez ses efforts, et les résultats s'il y en a. Il est important de dire, " tu n'as pas réussi à tout écrire, mais j'ai vu que tu as fait des efforts " de même que, " la dernière fois, tu n'avais écrit que 4 lignes, cette fois-ci tu en as écrit 6 " L'enfant se sent enfin reconnu. Il n'est plus le fainéant de service, mais un gamin qui bosse. Quel changement!
3-éviter la double peine
Les problèmes de dysgraphie entraînent bien trop fréquemment ceux qui en souffrent dans la spirale de l'échec scolaire. C'est la double peine.
J'écris salement, donc je n'aime pas relire mes cahiers ni les montrer, donc j'apprends moins bien mes cours.
J'écris salement, on ne peut pas me relire, je perds des points dans mes devoirs
J'écris lentement, je ne note que la moitié du cours, je ne peux donc pas l'apprendre correctement.
J'écris lentement, les autres écoutent le cours, moi, j'écris encore et suis concentré sur mon stylo. Je ne peux pas écouter le cours, donc je ne peux l'apprendre.
J'écris lentement, je ne finis pas mes devoirs, j'ai donc de mauvaises notes.
Une méthode simple pour que chaque élève ait des cours digne de ce nom : le binôme. On crée un binôme élève dysgraphique - élève bon scripteur, et on donne à l'élève dysgraphique une carte de photocopie. Ainsi, s'il n'a pas eu le temps de tout copier, ou s'il n'arrive pas à se relire, il a une solution simple et il est de sa responsabilité de la mettre en œuvre. Il n'y a plus d'excuse possible, prise de conscience du problème et responsabilisation.
4-des progrès? ou pas...
Si l'enfant est motivé, encouragé dans ses efforts, il va nécessairement progresser.
Comme nous l'avons vu, les autres élèves aussi, ce qui fait que ce ne sera pas forcément suffisant.
Si le problème d'écriture cursive est plutôt léger, il se peut que tout rentre dans l'ordre, c'est naturellement ce que nous souhaitons. Malheureusement, le nombre de cas d'enfants ou adolescents ayant des soucis avec l'écriture et réglant le problème seuls est plutôt rare.
En général, les problèmes ont plutôt tendance à s'accentuer avec le temps. Si l'on sent que le problème perdure, il sera alors temps d'entreprendre une vraie rééducation.